De nombreux observateurs affirment que « la situation de l’Islam et des musulmans du Monténégro n’a jamais été aussi bonne que maintenant » ; c’est là une phrase qui résume bien le sentiment répandu au Monténégro depuis l’indépendance de ce pays qui fut déclarée en 2006 ; en effet, les musulmans de ces contrées se sentent beaucoup plus libres qu’auparavant, et ce, malgré les accusations mensongères diffusées par les médias à leur sujet.
Et c’est donc après l’indépendance que fut construite une école islamique dont le but était d’aider à apprendre la religion aux musulmans du Monténégro ; par ailleurs, cette période a également vu la construction de mosquées, c’est ainsi par exemple qu’aujourd’hui une mosquée est en train d’être bâtie et une autre est en voie de rénovation, il faut savoir en outre qu’il y a environ cent mosquées dans ce pays. Le président des imams de la ville de Tivat, Adam Amrofic, a déclaré dans le quotidien Al-Charq al-Awsat : « Il y a dix ans la situation était encore mauvaise, la liberté dont nous jouissons aujourd’hui n’existait pas, il était par exemple impossible à une jeune fille voilée d’étudier à l’université ou de travailler dans une administration publique, mais maintenant cela est parfaitement possible », il poursuivit : « En conséquence de la répression subie par les musulmans dans les périodes passées, des milliers d’entre eux s’enfuirent des régions qu’on appelait alors la Yougoslavie, ils sont maintenant éparpillés en Turquie et dans les pays arabes, notamment en Syrie et dans le Royaume d’Arabie Saoudite », puis il ajouta : « Du point de vue des droits de l’homme, les musulmans sentent aujourd’hui que leurs droits élémentaires sont respectés, il n’y a pas dans le pays une instrumentalisation politique de la défense des droits de l’homme, de même qu’il n’y a pas d’interprétations idéologiques du concept de liberté ».
Le nombre de musulmans au Monténégro est plus grand que le chiffre qu’on entend habituellement qui est d’environ 5 %, en effet, ces derniers représenteraient environ 29 % de la population ; selon Adam Armofic : « Le nombre de musulmans dans ce pays est plus grand que ce que l’on dit, en fait il n’y a eu aucun recensement de la population sérieux depuis 1991, il existe au Monténégro de vastes régions dans lesquelles quasiment tous les habitants sont de confession musulmane, de plus les musulmans sont majoritaires dans plus de la moitié des régions du Monténégro », il rappela par ailleurs que les musulmans « représentent 70 % de la population dans la région de Bara, 99 % dans celle de Roujay, 8 % dans celle d’Alsin et dans la capitale, Podgorica, ils sont pas moins de 40 % ».
Voici ce que dit Adam Amrofic en ce qui concerne l’école islamique qui a ouvert ses portes en 2008/2009 : « Nous remercions Allah, car cette année scolaire s’est très bien passée, cette école accueille pas moins de 120 élèves musulmans dont la plupart sont Bosniaques et Albanais, ils ont terminé la première année du lycée ; cette école est la première école islamique en activité depuis 1918 ; en effet, après cette date (NdT : correspondant à la fin de l’empire ottoman) toutes les écoles islamiques se trouvant sur les territoires qui correspondaient à l’ex-Yougoslavie furent fermées, en fait une seule école islamique subsista, il s’agit de l’école Al-Ghâzî Khasref Beg se trouvant dans la ville de Sarajevo ; ainsi, tous les élèves musulmans du pays affluèrent vers cette école qui ne pouvait évidemment pas tous les accueillir, nous souhaitons donc que cette situation s’améliore dans le futur grâce à Allah puis grâce à cette nouvelle école ». Il dit en outre la chose suivante : « Cette école a pu voir le jour grâce à l’aide substantielle de la Turquie qui a donné pour ce projet plus d’un million d’euros ainsi que grâce à la participation de la Banque islamique de développement de Djedda et de celle d’organisations caritatives du Koweït et des Emirats Arabes Unis, lesquelles institutions ont apporté en tout pour la construction de cette école plus de 600 000 euros » ; puis il déclara : « Les autorités et les oulémas du Monténégro participent au frais de fonctionnement de l’école ».
Au sujet de la présence musulmane au sein des institutions officielles du pays, Amrofic a expliqué la chose suivante : « Il y a au Monténégro des portefeuilles ministériels octroyés aux musulmans, le directeur de la radio et de la télévision est un musulman, le ministre de l’intérieur est un musulman qui a étudié dans des écoles islamiques et le ministre du commerce est également un musulman » ; il a ajouté : « Nous faisons des démarches afin de récupérer les legs pieux qui avaient été confisqués durant les époques noires ». Par ailleurs, Amrofic a loué les efforts consentis par les Turcs, et ce, malgré le fait qu’ils aient peu soutenu les musulmans des Balkans, il a dit à ce propos : « Les Turcs ont fondé une école destinée à l’apprentissage du Coran ainsi qu’un centre islamique dans la ville de Bar qui se trouve sur la mer Adriatique ».
Les musulmans du Monténégro sont convaincus qu’ils sont ceux qui ont mené le pays vers son indépendance, pour Amrofic : « Les musulmans du Monténégro constituent une partie très active et dynamique de la société monténégrine, c’est ainsi que les musulmans sont ceux qui ont mené le pays vers son indépendance le 22 mai 2006, ils furent un élément essentiel de ce processus, ils ont fait pencher la balance dans le camp des partisans de l’indépendance ; et les musulmans continueront à jouer ce rôle, avec l’aide d’Allah, dans tous les événements électoraux ou sociétaux se tenant au Monténégro, nous constituons la troisième partie qui peut faire pencher la balance dans le camps de l’une des deux principales parties en concurrence, et ce, dans les domaines politique, caritatif, social, économique, etc. ».
Et sur le fait que les musulmans ont récolté les fruits de leur soutien à l’indépendance, Amrofic a dit : « Les musulmans monténégrins ont soutenu les partisans de l’indépendance, ils étaient face à deux choix : le refus de la partition de NikšIæ entre la Serbie et le Monténégro ou bien le soutien à la séparation de cette ville ; ils étaient donc face à deux choix dont le meilleur restait amer. Les uns pensaient que le maintien de l’unité de NikšIæ sans une reconnaissance totale des droits des musulmans était meilleur que la partition ; quant aux autres, ils étaient persuadés que l’unité se ferait à nouveau lorsque chaque région rejoindrait l’Union européenne. Notons qu’il existait de nombreux facteurs qui poussèrent à opter pour le second choix, ce dernier est un choix d’avenir à tous points de vue. La volonté obstinée d’une grande partie des habitants du Monténégro a aidé à éclaircir la position musulmane de soutien à l’indépendance, je ne peux pas nier qu’il y a eu des pressions sur nous afin que nous allions également dans ce sens, on nous expliquait que la Serbie avait été la cause de notre retard en tant que citoyens monténégrins et que nous devions aider le pays à tracer son avenir loin de l’influence de Belgrade. C’est ainsi qu’à la fin les musulmans décidèrent de soutenir l’indépendance, soutien qui durera tant qu’ils vivront dans un petit Etat dans lequel ils peuvent réaliser de nombreux buts, dont le premier d’entre eux qui est de vivre libres, on peut dire aujourd’hui qu’ils ont en grande partie réussi ce challenge ».
Et quant à savoir si les musulmans se rappellent de l’hostilité qu’ils subirent durant les périodes sombres, voici ce que dit Amrofic : « La situation était très difficile, nous sentions que nos faits et gestes étaient observés, il y avait à cette époque un véritable terrorisme d’Etat à tous les niveaux, et si l’indépendance n’avait pas eu lieu, nous serions restés dans cette mauvaise situation. Durant les guerres de nettoyage ethnique en Bosnie, nos ennemis étaient prêts à commettre un génocide contre nous au Monténégro, ils distribuaient des armes aux Serbes, et malheur au musulman dont on apprenait qu’il possédait une arme ou même si seulement on le soupçonnait d’en posséder une, c’est pourquoi à la nuit venue, nous perdions tout espoir de voir le matin et quand le jour se levait, nous nous demandions si nous allions être vivants le soir ; par ailleurs, les mosquées ont été attaquées. Et après l’indépendance, le pays s’est dirigé vers une intégration dans l’Union européenne, et parmi les conditions de cette intégration, il y avait l’obligation de respecter les libertés et notamment la liberté de culte et la liberté d’expression ; nous musulmans, nous avons profité de cela, nous avons pris contact avec les organisations qui défendent les droits de l’homme et nous leur avons exposé les choses qui nous blessent et nous inquiètent, et nous avons donc demandé que nous soient octroyées plus de libertés ».
Le cheikh a confirmé que l’organisation des savants islamiques de Serbie est devenue une grande organisation, il a dit à ce propos : « Nous nous tenons les coudes à tous les niveaux, NikšIæ est devenue la capitale de l’organisation des savants islamiques, cela s’explique par le fait que la plupart de ses habitants sont de confession musulmane ; et bien que cette organisation des savants islamiques se trouve au Monténégro, elle rassemble des Bosniaques et des Albanais. L’organisation des savants islamiques de Serbie est considérée comme la « maison mère » pour nous, l’organisation aide à la formation des imams et à la construction des mosquées ».
Pour finir, le cheikh a promis un avenir prometteur pour les musulmans de la république du Monténégro.